Taux d’intérêt limite : L’Administration tire les conséquences des récentes décisions du juge de l’impôt

L’Administration vient de publier 8 fiches pratiques visant à expliciter la manière dont une entreprise peut justifier de la normalité du taux d’intérêt pratiqué au titre d’emprunts auprès de sociétés liées.

Une société peut déduire les intérêts relatifs à des sommes mises à disposition par une entreprise liée dans la limite du taux fixé par le 3° du 1 de l’article 39 du CGI pour la déduction des intérêts des avances consenties par ses associés. Il peut toutefois être substitué à ce taux limite celui que l’entreprise emprunteuse aurait pu obtenir d’établissements financiers indépendants dans des conditions analogues, s’il est supérieur (CGI, art. 212, I-a).

Pendant de nombreuses années, l’Administration, comme les juridictions du fond, se sont montrées particulièrement exigeantes dans la démonstration du taux de marché applicable (l’Administration exigeant presque systématiquement la production d’une offre de prêt contemporaine).

Dans un avis du 10 juillet 2019, le Conseil d’État a posé le principe de liberté de preuve et admis qu’une société pouvait, le cas échéant, s’appuyer sur des comparables issus du marché obligataire (avis n°429426 et 429428, SAS Wheelabrator).

Il a, ensuite, confirmé son approche, plus souple et plus pragmatique, des modalités de démonstration de la preuve de la normalité du taux (CE, 10 décembre 2020, n°428522, Sté WB Ambassador et CE, 11 décembre 2020, n°433723, SA BSA).

L’Administration en tire les conséquences, dans une publication toute récente sur le site impôt.gouv. Elle y rappelle brièvement les principes applicables, et propose 8 fiches pratiques visant « à expliciter à l’aide d’exemples concrets, la manière dont la démonstration prévue à l’article 212-I-a du Code général des impôts peut être apportée et à exposer certaines bonnes pratiques ».

Les fiches portent sur les thèmes suivants :

  1. Dialectique de la preuve
  2. Modalités de preuve
  3. Comparabilité – publications méthodologiques d’agences de notation et risque de crédit
  4. Comparabilité – cas d’un ajustement améliorant la fiabilité d’un comparable
  5. Comparabilité – présence de différences multiples et substantielles
  6. Comparabilité – contrat de prêt bancaire à emprunteurs multiples
  7. Comparabilité – prêts « miroirs »
  8. Comparabilité – marché financier obligataire

L’Administration indique que ces fiches « doivent être prises ensemble et non isolément » et ne prétendent pas à l’exhaustivité. Elle précise également qu’elles ont vocation à être appliquées dans les contrôles et instances en cours.

À ce stade, il ne nous semble toutefois pas qu’elles puissent s’analyser comme de la doctrine opposable à l’Administration (en cohérence notamment avec la solution retenue s’agissant des fiches publiées par l’Administration à l’appui de sa carte des radars fiscaux, CE, 12 juillet 2017, n°401997), mais elles devraient, en tout état de cause, permettre une discussion constructive dans les contrôles.

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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Clara Maignan

Clara Maignan, avocat, a rejoint les équipes de Deloitte Société d’Avocats en 2011. Elle exerce au sein du Comité Scientifique Fiscal.