Régime mère-fille – Résultat sur lequel les dividendes doivent être prélevés

Le tribunal administratif de Montreuil estime, de façon très critiquable, que pour ouvrir droit au régime mère-fille, les dividendes doivent avoir été prélevés sur un résultat imposable.

Contrairement à ce que prétend le Tribunal, on ne peut réduire l’objet du régime mère-fille codifié aux articles 145 et 216 du CGI à la prévention d’un risque de double imposition des dividendes provenant des filiales. Comme l’a récemment rappelé le Conseil d’Etat, en instaurant ce dispositif, le législateur a eu comme objectif de favoriser l’implication de sociétés mères dans le développement économique de sociétés filles pour les besoins de la structuration et du renforcement de l’économie française (Conseil d’Etat, arrêts du 23 juin 2014, n° 360708, n° 352990, n° 360709).

La position du Tribunal conduirait à exclure du mécanisme d’exonération les produits de participation reçus de filiales déficitaires, que celles-ci soient établies à l’étranger ou en France.

Au surplus, on ajoutera qu’une telle interprétation priverait le régime mère-fille d’une large part de sa portée dans les chaines de participations comportant plus de deux niveaux. En effet, les dividendes qu’une filiale prélève sur ses résultats imposables pourraient être exonérés chez la société mère qui les perçoit mais leur redistribution par cette dernière à sa propre société mère n’ouvrirait pas droit à exonération entre les mains de celle-ci puisque cette redistribution aura par définition été prélevée sur un résultat non imposé.

Force est de constater que l’interprétation restrictive du Tribunal ne peut conduire qu’à une atténuation très substantielle de la portée économique du dispositif alors même que le texte des articles 145 et 216 du CGI est particulièrement clair sur ce point. En effet, si elle pose beaucoup de conditions sur le niveau et la qualité de la participation détenue dans la filiale, la loi fiscale ne pose pas comme un principe directeur que les dividendes doivent être prélevés sur des résultats imposables. Bien au contraire, le législateur a prévu, par exception et ponctuellement, des exclusions au régime pour les produits de participations émis par certaines sociétés dont les résultats sont exonérés en France ou à l’étranger, comme les SIIC ou les sociétés établies dans des ETNC.

On ne peut qu’espérer que la Cour administrative d’appel de Versailles, auprès de laquelle ce jugement a été déféré, retiendra une approche plus pertinente.

Références de la décision : Tribunal administratif de Montreuil, 1er juillet 2014, n° 1210110

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Patrick Fumenier

Patrick Fumenier a été avocat associé en charge de développer le knowledge management au sein de Deloitte Société d’Avocats de septembre 2016 jusqu’à son départ du Cabinet en janvier 2020. […]