Intégration fiscale : modalités d’appréciation du seuil de détention dans une SCA

La condition de détention à 95 % requise pour être filiale intégrée ne doit être appréciée qu’au niveau de l’assemblée des commanditaires

Pour être membre d’une intégration fiscale, une société doit notamment satisfaire à un critère de détention de son capital, directement ou indirectement, par la mère intégrante. Cette détention s’entend comme celle en pleine propriété de 95 % au moins des droits à dividendes, et de 95 % au moins des droits de vote attachés aux titres émis par la société (CGI, art. 223 A, I sixième alinéa, la LFR pour 2014 (article 71) ayant légalisé l’art. 46 quater-0 ZF ancien de l’annexe III du CGI).

Juridiquement (C. com. art. L. 226-1 et ss.), une société en commandite par actions compte deux collèges d’associés visant à dissocier :

  • la gestion de la société, assurée par les commandités, commerçants ayant vocation à recevoir une fraction des bénéfices de chaque exercice social afin de compenser les risques liés à leur responsabilité indéfinie et solidaire au passif social (intérêt préciputaire), mais dont l’apport n’est pas porté au capital social 
  • la détention du capital, assurée par les commanditaires, actionnaires dont la responsabilité est limitée au montant de leurs apports et ayant vocation à bénéficier des dividendes distribués par la SCA par prélèvement sur ses bénéfices et réserves

En l’espèce, l’option formée par une SCA pour être membre d’un groupe fiscal avait été remise en cause par l’Administration, au motif que sa société mère ne détenait que 5 % des droits de vote au sein du collège des commandités. Le service considérait, en effet, que la condition de détention de 95 % des droits de vote devait être satisfaite dans chacun des deux collèges.

Pour la CAA, au contraire, le capital d’une SCA étant exclusivement constitué par les apports des commanditaires (qui ont seuls la qualité d’actionnaires), seuls leurs droits de votes sont attachés à la détention de titres de capital. A contrario, les associés commandités ne disposent pas de droits de votes « attachés aux titres émis ». Il n’y a donc pas lieu d’apprécier la condition de détention à 95 %, par la mère intégrante, au sein du collège des commandités de sa filiale.

Le Conseil d’Etat confirme cette analyse, qu’il avait déjà eu l’occasion de retenir s’agissant de l’appréciation du critère de contrôle d’une SCA, pour l’application de l’amendement Charasse (CE, 13 juillet 2011, n° 312285, SAS FTR).

Il juge ainsi que seuls les titres détenus par les commanditaires doivent être pris en compte.

On rappellera, par ailleurs, que pour déterminer si une société constituée sous forme de SCA peut être mère intégrante d’un groupe fiscal, la doctrine administrative permet d’apprécier le pourcentage de détention du capital distinctement pour chaque catégorie d’associés s’agissant des droits de votes, et en faisant masse des droits des commandités et des commanditaires s’agissant des droits à dividendes (BOI-IS-GPE-10-20-20 § 30). En conséquence, une SCA même détenue à plus de 95 % par un actionnaire commanditaire majoritaire (soumis à l’IS) peut se constituer mère d’un groupe fiscal, dès lors que cet actionnaire détient, directement ou indirectement, moins de 95 % des parts sociales des commandités.

Pour la pérennité des groupes dont la société mère est une SCA dont un commanditaire à l’IS détient 95 % au moins du capital sans détenir 95 % des droits de commandités, il faut espérer que l’Administration ne rapporte pas sa doctrine.

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Patrick Fumenier

Patrick Fumenier a été avocat associé en charge de développer le knowledge management au sein de Deloitte Société d’Avocats de septembre 2016 jusqu’à son départ du Cabinet en janvier 2020. […]