Déduction des revenus tirés de la propriété intellectuelle en Belgique

La Belgique vient de substituer à son ancien régime un mécanisme conforme à l’action 5 du projet BEPS.

La Belgique vient de substituer à son ancien régime de déduction des revenus provenant de brevets (Patent income deduction) un nouveau mécanisme de déduction pour innovation (Innovation income deduction) conforme à l’action 5 du projet BEPS. Publié au Journal officiel le 20 février 2017, il s’applique avec effet rétroactif au 1er juillet 2016, date de l’abolition du régime qu’il remplace.

Le nouveau mécanisme permet une déduction de 85 % des revenus nets tirés de l’innovation. Répondent à cette qualification de revenus tirés de l’innovation les redevances de licence, mais aussi les revenus découlant de la vente de produits et services à hauteur de la quote-part représentative de la rémunération de la propriété intellectuelle (PI) ou encore les revenus de PI intégrés dans le processus de fabrication. Les plus-values de cession de droits de PI (sous certaines conditions) ainsi que les dommages-intérêts pour atteinte aux droits de la PI sont également visés. Le revenu concerné doit être exclusivement rattachable à un droit de la PI visé par le dispositif, comme par exemple, un brevet, un logiciel protégé par un copyright, un monopole accordé par une autorité publique, ou encore un médicament orphelin.

Le montant éligible à la déduction est calculé en appliquant au revenu net un coefficient (modified nexus fraction), devant être déterminé séparément pour chacun des droits concernés, et correspondant au ratio : Dépenses liées au droit de la PI visé par la mesure/Ensemble des dépenses de recherche et développement.

C’est notamment l’application de ce coefficient qui permet d’assurer la conformité de la mesure avec l’action 5 du projet BEPS. Pour mémoire, cette action tend à lutter contre les pratiques fiscales dommageables en incitant les Etats à éliminer ou modifier les régimes préférentiels grâce auxquels ils attirent artificiellement des bénéfices et non des activités substantielles. A ce titre, pour les régimes fiscaux de faveur liés à la PI, l’OCDE a développé une approche du lien modifié (modified nexus approach) selon laquelle les avantages consentis ne sont admis qu’en présence d’une activité significative de recherche et développement dans le pays considéré.

Enfin, il convient de noter qu’une mesure transitoire permet encore aux entreprises de bénéficier, dans une certaine mesure, de l’ancien régime de déduction jusqu’au 30 juin 2021. Les sociétés belges devront donc procéder à des arbitrages pour déterminer sous quel régime elles entendent se placer. Ce nouveau dispositif s’ouvre à des entreprises qui n’avaient pas accès à l’ancien régime, notamment dans le domaine du logiciel. La Belgique suit le mouvement de nombreux autres pays européens (Irlande, Pays-Bas, Royaume-Uni, etc.) qui ont récemment mis en conformité leur propre patent box avec l’approche « BEPS ». On remarquera que la France et son régime fiscal de faveur des brevets non conditionné à la R&D (CGI, art. 39 terdecies) deviennent ainsi de plus en plus isolés sur la scène internationale, ou au moins européenne.

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Patrick Fumenier

Patrick Fumenier a été avocat associé en charge de développer le knowledge management au sein de Deloitte Société d’Avocats de septembre 2016 jusqu’à son départ du Cabinet en janvier 2020. […]